Discours de Sayed Hassan Nasrallah, Secrétaire Général du Hezbollah, le 24 octobre 2015, à l’occasion de ‘Ashura, commémoration du martyre de l’Imam Hussein b. ‘Ali b. Abi Talib, petit-fils du Prophète, troisième Imam du chiisme duodécimain.

Traduction et sous-titres : Sayed Hasan

Transcription :

[Les propos entre guillemets reprennent des déclarations de l’Imam Hussein]

[…] Au nom de ce rassemblement massif en faveur de [l’Imam] Hussein, nous renouvelons haut et fort notre dénonciation véhémente de l’agression américano-saoudienne contre le peuple opprimé du Yémen et nous condamnons ces violations saoudiennes perpétrées contre toutes les sanctités au Yémen, sous les yeux et à portée de voix du monde entier qui reste silencieux face aux plus grands massacres actuellement perpétrés devant les caméras des médias du monde entier. [Audience : Mort à la dynastie des Saoud !]

Je confirme notre prise de position aux côtés de la Résistance du peuple yéménite, de son armée, de ses comités populaires et de ses forces islamiques et nationalistes. Nous sommes fiers de leur Résistance héroïque et sommes convaincus de leur victoire prochaine, quelles que soient les capacités et moyens déployés contre eux, car leur sang pur triomphera des épées des tyrans et des envahisseurs.


De même, nous condamnons la répression par l’Arabie Saoudite et les pays du Golfe du peuple du Bahreïn, révolté, opprimé, croyant et endurant, et, en même temps, déterminé à obtenir ses droits en termes de liberté, de souveraineté et d’honneur, quels que soient la répression et le terrorisme déployés contre lui.

Et nous compatissons et implorons la miséricorde pour les pèlerins vers la Maison de Dieu à Mina, dont le nombre des victimes a dépassé, selon les derniers chiffres, 2200 martyrs, plus un très grand nombre de disparus jusqu’à présent, à cause de la négligence, de l’échec et de l’incompétence du régime saoudien dans son service et sa protection des pèlerins vers la Sainte Maison de Dieu. Et nous appelons une nouvelle fois à une enquête sur ce massacre effarant et à veiller à ne pas oublier cette catastrophe épouvantable, qu’il faut graver dans les mémoires à jamais.

[…]


Nous, aujourd’hui, les enfants de [l’Imam] Hussein, la paix soit sur lui, nous déclarons aux Etats-Unis, à Israël, à la dynastie des Saoud, aux takfiris [de Daech] : « Par Dieu, non, par Dieu, nous ne vous ferons jamais allégeance, ce serait une humiliation, et nous
ne nous soumettrons pas à vous, car seuls des esclaves peuvent le faire. » Nous sommes les gens du djihad, de la Résistance. [Audience : « [Toute] humiliation [est] loin de nous ! »]
 
N’est-ce pas là l’école de [l’Imam] Hussein, la paix soit sur lui, celle qui nous a appris à faire les choix décisifs ? Comme nous le déclarons à toute occasion, et notamment hier soir [9e jour de Muharram, dernière avant le martyre de l’Imam Hussein], aujourd’hui encore, aujourd’hui encore, tous ceux qui incarnent Yazid [b. Mu’awiya, calife omeyyade qui a ordonné le meurtre de l’Imam Hussein] par leur tyrannie, leur arrogance, leur cruauté, leur agression contre l’Islam, contre les valeurs de l’Islam, ils nous mettent face à une alternative (deux choix), et quant à nous, le choix est clair : « Le bâtard [Yazid] fils d’un bâtard [Mu’awiya]… »
En tous temps et en tous lieux, [cela restera notre slogan face à] Yazid et Ibn Ziyad, et ceux qui incarnent aujourd’hui pleinement Yazid et Ibn Ziyad [meurtriers de l’Imam Hussein].

« Le bâtard [Yazid] fils d’un bâtard [Mu’awiya] nous a imposé de faire un choix entre deux choses, entre le fil de l’épée [la mort] et l’humiliation…
»  : [Audience : « Toute] humiliation [est] loin de nous ! » (= Plutôt mourir cent fois que s’avilir !)]
 
Qui est-ce qui nous interdit l’humiliation ? Qui
est-ce qui nous interdit l’humiliation ? « Dieu nous interdit une telle chose… » Ce n’est pas là un sentiment personnel, une résolution personnelle, un serment intérieur de certaines personnes qui, par Dieu, rechercheraient ardemment le martyre, non. « Dieu nous interdit une telle chose, ainsi que Son Prophète, les Croyants, les âmes élevées, les fiertés [nez] enthousiastes, ils nous interdisent de préférer l’obéissance à un criminel au sort des gens honorables [= le martyre]. » [Audience : « A ton service, ô Hussein ! »]

Et dans cette voie [résistante] de [l’Imam] Hussein et de [sa soeur] Zeynab, qu’avons-nous à attendre, vous et moi, sinon la dignité, l’honneur, la grandeur et la victoire, la gloire, au nom de [l’Imam] Hussein, de l’âme de Hussein et de la culture de Hussein, et du sang de Hussein victorieux sur l’épée de Yazid, en tous temps, et au nom de Zaynab, de la sagesse de Zaynab, de la patience de Zaynab, du courage de Zaynab, il n’y aura, pour quiconque emprunte cette voie, rien d’autre que la victoire, l’honneur, la grandeur et la dignité. 

Nous renouvelons, en ce dixième jour [du mois de Muharram], notre allégeance à Hussein, que la paix soit sur lui, et nous lui assurons : ô notre maître et notre Imam,par notre sang, par nos larmes, par notre souffle, par notre âme, par la chair de notre chair [nos enfants], nous assumerons et réaliserons tes objectifs, nous porterons la responsabilité de ton Islam, de ton sang, et nous triompherons par eux de l’épée de tout tyran, arrogant, envahisseur, occupant, et nous te renouvelons, en ce jour qui est le nôtre, et pour tous les jours, années, et siècles à venir, notre allégeance, notre amour et notre engagement indéfectible à ton secours : « A ton service, ô Hussein ! » [Audience : « A ton service, ô Hussein ! »]
[…] »


Commentaires que j’ai postés sur Agoravox

Beaucoup de réactions [à cette vidéo] sont assez consternantes.

Premièrement, en ce qui concerne les attaques contre Agoravox, le fait de publier un discours n’implique nullement un endossement de ce discours. C’est tout simplement un travail de journalisme, de sociologie, etc., que de comprendre les conceptions de populations entières, acteurs majeurs du Moyen-Orient de surcroît.

En ce qui concerne les remarques sur [le manque de] contextualisation du discours, si, en 2015, les crimes [atroces] des Etats-Unis, d’Israël et de l’Arabie Saoudite, créateurs & [soutiens] des égorgeurs de l’Etat Islamique, ne sont pas connus, alors autant ne rien dire. Ce sont des postulats de base, et si, avant de développer quoi que ce soit, il fallait rappeler les rudiments comme s’ils étaient inconnus, alors on n’en finirait jamais.

Enfin, ne pas comprendre que ces [slogans] sont les cris des opprimés, massacrés par dizaines de milliers à cause de projets hégémoniques sur la région imposés de l’extérieur, et qui ne signifient rien d’autre que “A bas les occupants et oppresseurs”, car tant qu’ils seront en place, il n’y aura pas de paix possible, c’est faire preuve sinon de mauvaise foi, du moins d’une crasse ignorance. Le Tribunal de Nuremberg a condamné à mort les dirigeants nazis, et avant cela, il y a eu l’épuration en France. Peut-on reprocher à des populations ayant souffert l’innommable durant des décennies de vouloir expulser les Occupants étrangers et exécuter les collaborationnistes ? Aucune contestation possible du premier point. Sur le deuxième, il y a des opposants de principe à la peine de mort, mais [a-t-]on [encore] le droit d’être d’un avis opposé ?

Liberté d’expression, par quelles moyens détournés on s’en prend à toi… […]

De tels slogans se comprennent parfaitement comme la plus légitime défense contre des agresseurs sanguinaires insatiables, ce qui est un des droits les plus sacrés de l’individu. Une opposition de principe à ce discours ne peut émaner que d’un colonialiste, impérialiste, opposé à l’auto-détermination des peuples, etc. Si, dans un pays qui soutient, en paroles et en actes, les égorgeurs de Daech et les exécutions extrajudiciaires de ressortissants français, on ne peut plus rappeler de telles vérités élémentaires, alors autant mettre la clé sous la porte (en tant que blogueurs, journalistes alternatifs, etc.).


Il y a tout de même une perte de repères et de valeurs effarante. Un pays qui a connu l’Occupation nazie (et avant cela, l’Occupation européenne, mère de notre hymne national invoquant d’abreuver nos sillons du sang impur des envahisseurs…) ne devrait pas, à ce point, être choqué par des déclarations si “naturelles”, qui sont la voix la plus noble de la résistance à l’oppression, sans compromission, au prix de sa propre vie. Le “Patria o muerte” de Fidel et du Che, qui dénonçaient la bestialité innée de l’impérialisme (tuer ou être tué), ne dit pas autre chose. Rappelons Jaurès, dont les propos dénonçant le colonialisme français sont toujours d’actualité :

Des fanatiques ? Alors là, messieurs, je ne comprends pas : quand un Français vous dit qu’il serait prêt à défendre, jusqu’à la dernière goutte de son sang, l’intégrité de son pays, vous le félicitez. Vous affirmez même que des hommes qui ne voudraient pas mourir pour leur pays seraient les derniers des lâches ! Mais quand ces hommes sont des Africains qui voient venir ce qui pour nous est la France, mais ce qui pour eux est l’étranger, qui voient venir des hommes en armes et des obus pleuvoir ; quand eux se défendent et défendent leur pays, vous les déshonorez du nom de fanatiques ! Ces hommes que vous insultez, messieurs, sont seulement aussi patriotes que vous. Et aussi attachés que vous à défendre leur pays et leur civilisation. Une fois de plus, c’est le préjugé d’ignorance qui vous mène.
 C’est à vous, à la France, à toute la France pensante, qu’il faudrait enseigner ce qu’est cette civilisation arabe que vous ignorez et méprisez, ce qu’est cette admirable et ancienne civilisation. À laquelle les pays européens, je dis bien les pays européens, viennent montrer le visage hideux de l’invasion et de la répression… Ce monde musulman que vous méconnaissez tant, messieurs, depuis quelques décennies prend conscience de son unité et de sa dignité.

Peut-être opposerez-vous qu’il serait préférable de préciser tout cela et de changer le titre, ce avec quoi je n’ai pas d’opposition de principe, tant que le contenu reste non altéré. Mais parfois, il est nécessaire d’écouter, sans le moindre filtre, dans toute son authenticité, “Le Cri des Peuples” (cf. Vallès). […]
PS : il n’est pas question du conflit sunnites-chiites mais d’universaux, tant en Islam (tout le monde soutient Hussein contre Yazid, tant sunnites que chiites) qu’au niveau de l’humanité, Hussein étant un symbole de la résistance contre l’oppression.